La semaine dernière, j’ai eu le plaisir d’être à Istanbul pour rencontrer des confrères et consœurs de plus de 30 pays différents, tous spécialisés comme moi en droit de la famille. Le soleil brillait et c’était agréable de retrouver mes collègues. C’est une ville magnifique.
Toutefois, une réunion séparée, avec des avocats du barreau turc et organisée par mes collègues de Paris et de Genève, m’a rappelé à quel point nous avons de la chance au Royaume-Uni, où l’État de droit s’applique. Les pires choses qui me sont arrivées cette semaine, à mon retour à mon cabinet londonien, ont été de courir après des factures de clients, de me replonger dans des dossiers complexes et de me demander quand le tribunal approuvera enfin trois ou quatre décisions en attente, dans nos juridictions civiles privées de financement. Bref, les petits tracas du quotidien d’un professionnel du droit à Londres.
Mais pensons un instant au président du barreau d’Istanbul et aux membres de son conseil. Ce sont des avocats, comme vous et moi. Mais à la différence de nous, ils font face cette semaine, devant la Haute Cour d’Istanbul, à l’ouverture d’un procès pénal pour diffusion de propagande terroriste, et risquent des peines pouvant dépasser dix ans de prison.
Or, ils n’ont absolument rien fait de tel. Si vous posez la question, on vous dira que le président du barreau d’Istanbul est l’un des constitutionnalistes de Turquie les plus respectés. Ils ont seulement, en tant que conseil du barreau, demandé collectivement en décembre 2024 l’ouverture d’une enquête sur la mort de deux journalistes turcs qui couvraient la situation depuis la Syrie.
L’État turc a, ces dernières années, un passif lourd en matière d’atteintes aux journalistes comme aux avocats. Ces derniers mois, de nombreux avocats ont été harcelés, voire arrêtés, simplement pour avoir défendu leurs clients. C’est pourquoi je vous invite, en tant que confrères et consœurs, à vous informer sur ce procès et la situation en Turquie, et à soutenir l’association de votre barreau local ou national sur ce sujet.
Vous découvrirez peut-être que votre association envoie déjà des représentants pour assister aux procès. Vous allez peut-être être surpris, mais en mars 2025, les 46 États membres du Conseil de l’Europe ont ratifié la toute première Convention internationale sur la protection de la profession d’avocat.
Malheureusement, ce qui se passe actuellement en Turquie rend cette Convention d’autant plus nécessaire et urgente.