Chéri(e), mon avocat a rétréci notre mariage !

APRIL 16, 2024

POSTED BY: WILLIAM HEALING

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Dans le contexte de la course à la numérisation, les avocats travaillant en droit de la famille disposent aujourd'hui d'une série de portails judiciaires sur lesquels ils doivent naviguer pour déposer des documents pour leurs clients. Le papier n'est pratiquement plus utilisé.

La décision Williams v Williams, rendue par le président de la division famille de la High Court précédemment en avril 2024, met en lumière les limites et les pièges qui attendent les avocats et leurs clients.

Un cabinet d'avocats londonien spécialisé dans le droit de la famille a accidentellement déposé en octobre 2023 une demande d'ordonnance finale de divorce pour le mauvais client. Le tribunal a donc prononcé le divorce de Mme Williams au lieu de celui de Mme X.

Sir Andrew McFarlane, un haut magistrat de la High Court, a estimé que le fait que Mme Williams ne voulait pas divorcer à l'époque n'était pas pertinent, et que le seul recours qui lui est ouvert dans cette situation est poursuivre ses avocats. Pour la Hight Court, l'ordonnance de divorce est définitive et déclaratoire.

Un sondage dans mon cabinet a révélé qu’une écrasante majorité de mes collègues estiment que la décision est sévère pour le cabinet d'avocats et pour Mme Williams. J'irais même respectueusement jusqu'à dire qu'elle est erronée.                                                                        

La High Court a estimé que le pouvoir du tribunal d'annuler ses propres ordonnances est extrêmement limité, et ce pour de bonnes raisons de principe – comme le caractère définitif de la prise de décision. Le fait d'être divorcé est une déclaration au monde et ne devrait pas être facilement annulé.

Mais j'ai du mal à accepter cette situation pour de nombreuses raisons, et je soupçonne qu'il en va de même pour la grande majorité des membres de ma profession. Je pense à au moins six raisons :

  1. Il n'y avait pas de litige complexe que le tribunal aurait annulé (la situation habituelle où les tribunaux ne veulent pas annuler quelque chose). Le tribunal aurait simplement annulé une mesure administrative accidentelle. L'argument de la finalité du litige ne s'applique donc pas vraiment.
  2. M. Williams a bénéficié d'une sorte d'avantage tactique dans des circonstances purement accidentelles. Il s'est battu pour que le prononcé du divorce soit maintenu (même s'il n'a pas introduit la demande de divorce !) et on peut donc supposer qu'il doit en tirer un certain avantage. Mais pourquoi devrait-il bénéficier de cet avantage, alors que l'équité est peut-être ailleurs ?
  3. Dans la plupart des cas de divorce, il est admis que, pour des raisons de planification fiscale et de questions liées à la retraite, le meilleur stade à atteindre est celui du "divorce conditionnel", où les parties sont à une étape avant le divorce définitif, comme dans une salle d'attente de divorce, mais ne sont pas réellement divorcées, jusqu’à ce que le demandes financières sont tranchées par le tribunal. Le tribunal aurait pu soutenir cette convention et ramener les parties à ce stade.
  4. Le tribunal n'aurait fait que ramener le mariage à l'état d'un jugement de divorce conditionnel, la salle d'attente, et non à un mariage complet.
  5. Le tribunal peut être disposé à annuler des décisions de divorce conditionnel pour revenir à un mariage complet, ce qui est une étape beaucoup plus importante – voir la décision de la Cour d'appel dans l'affaire récente de mon cabinet, Cazalet c. Abu Zhalaf.
  6. Il n'existe aucune jurisprudence sur ce point, ni aucune jurisprudence suggérant qu'un divorce "accidentel", qu'aucune des parties n'a voulu, ne peut être annulé. La Cour a renversé cette logique et a déclaré que, puisqu'il n'y avait pas de jurisprudence sur ce point, elle ne devait pas intervenir pour annuler l'ordonnance de divorce.

William Healing est un avocat spécialisé en droit international de la famille, notamment dans les affaires ayant une dimension francophone ou européenne. Il possède la double nationalité et est bilingue. William peut être contacté à l'adresse william.healing@afpbloom.com ou au +44 20 7409 1222.

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